Qu’est-ce qu’une douleur chronique ?

La douleur chronique est une douleur continue ou récurrente qui dure généralement plus de 3 à 6 mois. Elle peut persister notamment plus longtemps que la période normale de guérison d'une maladie ou d'une blessure.

Cette douleur chronique peut avoir des conséquences pratiques dans la vie quotidienne, par exemple ne plus pouvoir faire des gestes courants. Un traitement médicamenteux peut aussi avoir des effets secondaires ayant eux-mêmes un retentissement sur les activités, qu’elles soient familiales ou professionnelles. La qualité de vie en est donc très atteinte.

L’expérience de la douleur chronique est multidimensionnelle.

Elle a des conséquences physiques et sensorielles : sa localisation (diffuse ou limitée à une certaine zone), sa forme, son intensité peuvent varier d’un moment à l’autre. La respiration se modifie lorsqu’une douleur apparait. La sensation physique de la douleur est ce que l’on pourrait appeler la douleur primaire, originelle.

Elle a aussi des conséquences émotionnelles. Elle peut être un peu désagréable et aussi insupportable ou extrêmement pénible. Au-delà du symptôme douloureux, la douleur peut avoir un impact sur la qualité du sommeil ou bien entrainer de l’anxiété, de la fatigue, et même un syndrome dépressif. Les personnes souffrant de douleur chronique peuvent aussi se sentir isolés car elles ne sont plus en mesure d’avoir une vie sociale « normale ».

Tout cela participe à aggraver la douleur. Les conséquences et ressentis sont ce que l’on pourrait appeler la douleur secondaire, autrement dit la souffrance que l’expérience de la sensation douloureuse implique.

Notre rapport à la douleur, et donc à la douleur chronique, est personnel et individuel.

Nous sommes les seuls à avoir la perception de notre douleur, à en connaître son intensité. Nous sommes les seuls à faire l’expérience de notre douleur. Notre sensibilité à la douleur est différente de celle d’une autre personne.

C’est parfois difficile pour l’entourage ou les médecins de comprendre ce qui est vécu. L’utilisation d’échelles de niveau de la douleur, de métaphores (« comme un coup de couteau ») ou d’autres stratégies permettent aux patients de mieux décrire leur souffrance.

Les origines des douleurs chroniques sont nombreuses.

Les nouvelles technologies, comme les scanners ou les irm permettent parfois d’en détecter des causes (ex : lombalgie chronique due à des lésions de la colonne vertébrale). Certaines pathologies sont connues pour être associées à des douleurs chroniques : le cancer, l’arthrite, la fibromyalgie, les lésions de la colonne vertébrale… Parfois, l’origine physique de la douleur reste inconnue, ce qui peut entrainer l’anxiété de « ne pas savoir ».

 

En quoi la méditation pleine conscience vous aide-t-elle à faire face à votre douleur chronique ?

L’intérêt de la pratique de la méditation pleine conscience a été prouvée d’abord de façon empirique et ensuite par les études scientifiques.

- De façon empirique, parce que l’on s’est rendu compte que les personnes qui souffraient de douleurs chroniques qui avaient commencé à méditer partageaient le fait qu’elles avaient moins de douleurs. La douleur ne disparaissait pas forcément, mais elle était moins intense et le rapport entretenu avec elle avait évolué.

- De façon scientifique ensuite : cette diminution de la perception de la douleur a intrigué les scientifiques. Les neurosciences se sont intéressées à la méditation et ont montré que pratiquée régulièrement, elle entrainait des modifications structurelles du cerveau. Ces modifications entrainent en même temps des changements dans nos modes de fonctionnement.

Notre cerveau n’a pas beaucoup évolué depuis les hommes primitifs. Il n’aime pas ce qui est désagréable. C’est comme une loi de la nature, un mécanisme de défense. Donc, lorsque la douleur survient, il est normal pour lui de lutter contre elle. On ne veut pas de cette douleur, on la rejette et on la combat. Y faire face est un véritable défi. Le cerveau va faire tout ce qu’il peut pour mettre en place des stratégies pour en détourner son attention.

Cette lutte entraine elle-même des tensions, de la fatigue et des émotions qui entretiennent ou aggravent le ressenti de la sensation douloureuse. Ce résultat peut être très difficile à vivre pour les patients.

La méditation pleine conscience propose une autre voie : celle d’aller à la rencontre de la douleur et de « faire la paix » avec elle. Et ce n’est pas une chose facile, car cette voie est contre-intuitive. La réaction automatique de notre cerveau, consistant à la rejeter, est tellement ancrée en nous que de se dire « il est bon pour moi de faire la paix ».

Pourtant, c’est cette voie qui nous ouvre d’autres possibilités. A partir du moment où nous nous tournons vers le désagréable, vers la douleur, notre relation à elle change instantanément. Nous développons un nouveau rapport avec elle, qui entraine une diminution du ressenti de celle-ci. On peut parler d’acceptation, ce qui ne veut pas dire résignation. Le fait d’accepter le symptôme douloureux nous offre, au contraire, de nouvelles possibilités d’agir et de sortir de notre zone de confort, qui était en fait plutôt inconfortable.

La méditation n’est pas là pour faire le vide dans notre esprit car c'est  bien impossible (notre esprit est fait pour fabriquer des pensées et il le fait à chaque instant). Elle nous permet mois après mois, année après année, de mieux comprendre comment fonctionne notre esprit et un entrainement de notre attention à se diriger vers ce que l’on décide, plutôt que de laisser l’esprit vagabonder vers des pensées négatives et anxiogènes.

 

Méditation pleine conscience et douleur chronique : comment faire ?

Quels que soient les moyens qui vous choisirez, à partir du moment où vous méditerez régulièrement, votre cerveau commencera à se modifier et vos réactions aussi dans tous les domaines de votre vie.

Pour commencer, il existe quelques petits exercices simples, pour comprendre notre relation à la douleur.

Si vous voulez aller plus loin, suivre un atelier ou un programme de méditation est plutôt une bonne idée. Vous y apprendrez plus rapidement de nouvelles compétences pour vous soutenir au quotidien de façon plus durable.

Le programme MBSR (programme de réduction du stress basée sur la pleine conscience – Mindfulness-Based Stress Reduction) a été le premier à montrer des bienfaits sur la douleur chronique. Il s’adressait d’ailleurs à des patients volontaires d’un hôpital américain près de Boston souffrant de lourdes pathologies. Le programme MBCT (thérapie cognitive basées sur la pleine conscience), intégrant des éléments de TCC, l’a confirmé quelques années plus tard.

Depuis les années 2000, au Royaume-Uni a été développé un programme spécifique destiné aux personnes souffrant de douleurs chroniques et de difficultés de santé. Il s’agit du programme MBPM (Mindfulness-Based Pain Management – Gestion de la douleur basée sur la pleine conscience).

Créé par l’institut Breathworks, il est né de l’expérience de Vidyamala Burch, qui souffre depuis longtemps de douleurs chroniques liées à des lésions de sa colonne vertébrale à la suite d’un accident. Sa rencontre avec la méditation a changé sa vie. Cela lui a permis de retrouver un équilibre et de diminuer son traitement médicamenteux, même si elle a toujours besoin de médicaments lorsque les douleurs sont trop intenses. Ses expériences personnelles et ses recherches ont abouti à l’élaboration de ce programme de 8 semaines, inspiré du programme MBSR.

Le programme MBPM a plusieurs axes. Il est proposé en petits groupes, en ligne ou en présentiel. L’intérêt du groupe est multiple. Il permet notamment de rompre l’isolement ressenti par certains patients. Les participants apprennent aussi grâce aux expériences des autres. Bien-sûr la découverte de la pratique de la méditation pleine conscience, au travers de pratiques adaptées à ces patients. Les participants sont invités à pratiquer des méditations d’une dizaine de minutes deux fois par jour grâce des enregistrements. Ils se familiarisent avec leur respiration (qui peut jouer un rôle pour apaiser les douleurs), avec les sensations de leur corps (qui ne sont pas toutes désagréables) et aussi avec leur état émotionnel (à l’origine de leur douleur secondaire, de leur souffrance).

Semaine après semaine, ils vont apprendre, à leur rythme, à tisser de nouveaux liens avec ce qui les fait souffrir.

La moitié des pratiques de méditation est orientée vers la compassion : terme peu utilisé ou détourné de son sens en France, il s’agit (dans les grandes lignes) de remarquer combien l’auto-jugement peut être néfaste, et que le fait de développer des compétences d’auto-compassion, de bienveillance et de gentillesse avec nous-même, peut radicalement changer notre vision des choses. La recherche en psychologie a montré qu’un entrainement à la compassion a des effets bénéfiques sur notre moral et notre bien-être.

Le dernier axe est basé sur le « Pacing Breathworks », un « plan » de pleine conscience au quotidien. Le but de ce « Pacing » est de développer de nouvelles compétences pour gérer au mieux les douleurs chaque jour, mais aussi sur le long terme. Le Pacing permet de retrouver et reconstruire un équilibre parfois perdu depuis longtemps.

Ces trois axes centraux guident les participants séance après séance vers une vie apaisée, et ce, même si la douleur ne disparait pas complétement.

 

Méditation et douleur : que nous dit la recherche scientifique ?

De plus en plus de chercheurs étudient les programmes basés sur la pleine conscience et la question de son intérêt dans la gestion du stress, de la douleur ou de l’anxiété. Les neurosciences nous offrent de plus en plus de données et d’informations sur le fonctionnement cérébral.

Après 20 années d'évaluation et de plus d'une douzaine d'études cliniques scientifiques publiées, il s’avère que le programme Breathworks MBPM apporte des améliorations significatives dans de nombreux domaines, notamment sur :

  • le degré de la douleur
  • l’interférence de la douleur
  • la « catastrophisation de la douleur »
  • l’acceptation de la douleur
  • l’auto-gestion de la douleur (être capable de gérer malgré la douleur)
  • les difficultés de sommeil
  • le bien-être / la qualité de vie / la vitalité
  • la détresse émotionelle
  • l’autocompassion
  • la fatigue : degré et conséquences
  • une qualité de présence et de conscience accrues

Les publications académiques examinant avec méthode l'impact du programme Breathworks MBPM en 2010-2018 comprenaient des essais contrôlés randomisés, des études basées sur des entretiens et une revue de la littérature. Il a été conclu qu’« il y a un bénéfice potentiel clair pour la pleine conscience aidant les personnes souffrant de maladies de longue durée et de douleurs chroniques. »

Brown et Jones (2013) ont conclu que « le programme Breathworks a amélioré le bien-être mental des patients et leur sentiment de pouvoir contrôler leurs symptômes de douleur. Ces améliorations étaient liées à des changements dans les modèles d'activité dans les régions du cerveau impliquées dans le contrôle cognitif et la régulation émotionnelle. »

Long (2016) a constaté que la pratique de la pleine conscience apportait un bénéfice très significatif pour le bien-être de la plupart des participants, avec des effets durables depuis la participation au programme, jusqu'à 8 ou 9 ans plus tard dans certains cas !

 

Méditation pleine conscience et douleur : un réel intérêt

La gestion de la douleur chronique est parfois difficile. Les traitements et médicaments peuvent ne pas suffire à soulager le patient et tout ce qui peut le soutenir est intéressant à explorer.

La méditation pleine conscience est incontestablement une approche intéressante pour offrir aux patients de nouveaux outils et lui permettre une vie plus apaisée malgré son état de santé.

Le programme MBPM commence à être déployé en France et en Belgique. Des formations sont organisées pour que de plus en plus de patients en bénéficient. L’ouvrage de Vidyamala Burch et Danny Penman sur le programme MBPM,  devrait être disponible chez De Boeck supérieur courant 2022-2023 (« Vous n’êtes pas votre douleur : utilisez la pleine conscience pour soulager la douleur, réduire le stress et restaurer le bien-être », traduction Bénédicte Long et Sébastien Pichenot).

Seuls les instructeurs et instructrices présents sur le site https://pleineconsciencebreathworks.fr/  sont d'instructeurs certifiés MBPM ou MFS, ce qui vous garantit un enseignement du programme tel qu'il a été conçu. Si la personne n'est pas dans cette liste, il se peut qu'elle soit dans la troisième étape de sa formation, à savoir un cours pratique sous supervision. En cas de doute, n'hésitez pas à contacter breathworks.mindfulness.france@gmail.com pour savoir où elle en et dans son processus de formation.